jeudi 23 août 2012

Le bonheur conjugal de Tahar Ben Jelloun


Cela est arrivé à tout le monde : se retrouver lors d'un dîner ou d'un déjeuner, l'otage d'un(e) ami(e) qui de répand sur sa vie de couple, longuement, bavant sur la moitié absente, se donnant le rôle de martyr.
"Le bonheur conjugal" de Tahar Ben Jelloun est du même ressort sauf que l'on dîne deux fois : une fois avec le mari et une fois avec la femme.
Le dîner (ou le déjeuner) avec le mari est plus long, plus convivial. Il faut dire qu'il est un grand peintre marocain dont chaque tableau vaut un fortune. Un peu affaibli par un accident cardio-vasculaire dont il se remet doucement. Grand séducteur très vieillissant, il nous parle de ses nombreuses conquêtes, femmes aimées et parfois représentées sur ses toiles. Il nous parle aussi de sa femme légitime, plus jeune que lui, dont il a été éperdument amoureux... un petit moment et qui, au fil du temps, s'est transformée en harpie. Infidèle par habitude puis par nécessité hygiénique, le mariage de l'artiste bat sérieusement de l'aile. Il souhaiterait divorcer mais son épouse, aidée d'hommes de loi, ne l'entend pas de la même oreille et souhaite avant tout lui soutirer le maximum d'argent.
La conversation du peintre est agréable, nous sommes en empathie. Homme sensible et charmeur, il sait manier le verbe et rendre son récit élégant et délicat même si parfois il est teinté d'un machisme très méditerranéen. Nous le quittons emplis de confidences qui ont un tel accent de vérité que la sympathie finit par l'emporter sur l'impression que ce type est tout de même un fieffé salaud.
Lors du dîner avec la femme, le ton est radicalement différent. La rancoeur, l'aigreur sont les principaux ingrédients du récit qu'elle nous fait de sa sordide vie de couple. Cette nouvelle version éclaire bien évidemment de manière beaucoup moins idyllique la relation et donne un éclairage parfaitement cruel.
Bien sûr, nous nous attarderons moins à sa table. La conversation, trop directe et tellement hargneuse n'incite guère à prolonger la soirée.
Le nouveau roman de Tahar Ben Jelloun, divisé en deux parties assez inégales (par la longueur et vous devinez aisément qui a la part belle) nous parle de la conjugalité, de ses joies (s'il y en a) mais surtout de ses difficultés. Sujet pas franchement original, même si vu par un homme, je ne peux pas dire que la lecture m'est passionnée au point de dévorer ce livre sans m'arrêter. Les personnages se révélent finalement tous assez antipathiques (surtout la femme autant maltraitée en tant que personnage qu'épouse). Reste l'écriture fluide, classique et légère qui permet de tourner les pages plaisamment.
 "Le bonheur conjugal" est le genre de roman qu'on retrouve tous les soirs avec confiance, qui nous accompagne agréablement, que l'on termine sans peine mais qui ne nous remue pas énormément.



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